Krisis 46: Nation et souveraineté?

Recension : Krisis 46 : Nation et souveraineté ?
Nous vivons à l’ère de la mondialisation. Les flux de communication n’ont jamais été aussi intenses. Nous échangeons sur les réseaux sociaux avec des Américains, des Brésiliens ou des Chinois, alors que, dans le même temps, nous ignorons parfois jusqu’au nom de notre voisin de palier. Le monde moderne rétrécit la distance qui nous sépare du lointain, tout en nous éloignant paradoxalement de notre prochain, c’est-à-dire de celui qui se trouve au sens propre «juste à côté de nous». La modernité engendre des bienfaits indéniables, sans lesquels nous ne pourrions plus vivre : nous sommes heureux de voyager, de découvrir d’autres contrées avec une facilité inédite dans l’histoire. Mais la mondialisation implique un brouillage des repères. Tout évolue à un rythme frénétique. Autrefois, les hommes vivaient dans le même monde, de la première à la dernière heure de leur vie. Or, depuis un demi-siècle, notre paysage a été considérablement dépaysé. Nous sommes confrontés à des produits matériels et culturels venus des quatre coins du globe, comme les plats que nous mangeons, les films que nous regardons ou les vêtements que nous portons. Et nous voyons surgir à chaque décennie une véritable révolution technologique qui bouleverse la société: l’automobile, la télévision, le téléphone portable, l’Internet. Face à des changements aussi rapides, l’ici et l’ailleurs n’ont plus guère de signification. Les gens finissent par se demander qui ils sont, et d’où ils viennent. Cette situation explique la résurgence de l’idée nationale dans le discours politique. Devant l’infini de l’horizon, on cherche à renouer des racines. Reste à savoir sous quelle forme, et par quels moyens.
Éditorial
Entretien avec Pierre Manent / Le sentiment national dans un monde en crise.
Charles Taylor / Démocratie, nationalisme et exclusion.
Thibault Isabel / Individualisme, nationalisme et identité à l’ère du village global.
Entretien avec Dominique Schnapper / La république face aux problèmes d’intégration.
Pierre-André Taguieff / Sous le «populisme» : le nationalisme.
Entretien avec Pierre-André Taguieff / La révolte contre les élites ou la nouvelle vague populiste.
Guy Hermet / Les voisinages incertains du populisme.
Frédéric Dufoing / La doctrine de l’État fédéral et le déficit démocratique européen.
Denis Collin / Faut-il enterrer l’État-nation ?
Otto Bauer / Document : Le concept de nation (1907).
David L’Épée / Nation et résistance aux empires : le cas helvétique.
Louis Narot / Charles Maurras et le nationalisme intégral.
Les auteurs de ce numéro
Otto Bauer : Né à Vienne le 5 septembre
1881, mort à Paris le 5 juillet 1938. Grande figure de l’austro-marxisme. Ami
de Kautsky et collaborateur de la revue socialiste Neue Zeit, il rédige en 1907 l’ouvrage La social-démocratie et la question des nationalités, dont est tiré
le texte que nous publions ici. Il devient en 1918 le leader du Parti ouvrier
social-démocrate autrichien, puis ministre des affaires étrangères en 1918 et
1919, grâce à une coalition avec le Parti chrétien social. Il émigre en 1934
pour fuir le nazisme.
Denis Collin : Né en 1952,
professeur de philosophie, ses travaux tentent de concilier marxisme et
républicanisme. On lui doit notamment La
théorie de la connaissance chez Marx (L’Harmattan, Paris 1996), La fin du travail et la mondialisation
(L’Harmattan, Paris 1997), Morale et
justice sociale (Seuil, Paris 2001), La
matière et l’esprit : sciences, philosophie et matérialisme (Armand
Colin, Paris 2004), Revive la
République ! (2005), Comprendre
Marx (2006), Comprendre Machiavel
(2008), Le cauchemar de Marx : le
capitalisme est-il une histoire sans fin ? (Max Milo Éditions, Paris
2009), La longueur de la chaîne :
essai sur la liberté au XXIe siècle (Max Milo Éditions, Paris
2001) et Libre comme Spinoza (Max
Milo, Paris 2014). On peut consulter son blog à l’adresse : <http://denis-collin.viabloga.com>.
Frédéric Dufoing : Né
en Belgique, il réside actuellement au Luxembourg. Professeur de philosophie, politologue, spécialiste de l’économie
politique internationale. Auteur de L’écologie
radicale (Infolio, Paris 2012), il fut le co-fondateur de la revue Jibrile et collabore régulièrement à Éléments, Limite et La Nef.
Guy Hermet : Né en 1934, sociologue, politologue et historien, ancien chercheur à la
Fondation nationale des sciences politiques, directeur du Centre d’études et de
recherches internationales entre 1976 et 1985, docteur honoris causa de
l’Université complutense de Madrid, il est notamment l’auteur de Les populismes dans le monde : une
histoire sociologique (Paris, Fayard 2001) et de L’hiver de la démocratie ou le Nouveau Régime (Paris, Armand Colin
2007).
David L’Épée : Né en Suisse en 1983, diplômé en philosophie. Collaborateur régulier des
revues Éléments et Rébellion, il s’est spécialisé dans l’histoire
du socialisme et les débats autour de la démocratie directe. Il est par
ailleurs critique de cinéma indépendant.
Thibault Isabel : Né en 1978 à Roubaix. Rédacteur en
chef de Krisis. Docteur en
esthétique, il travaille dans le domaine de la philosophie générale, de l’anthropologie
culturelle et de l’étude comparée des mentalités et des systèmes de pensée.
Auteur de nombreux articles parus dans des revues spécialisées, ainsi que de
plusieurs ouvrages : Le champ du possible (La Méduse, Lille 2005), La
fin de siècle du cinéma américain (La Méduse, Lille 2006), Le paradoxe
de la civilisation (La Méduse, Lille 2010), À bout de souffle (La Méduse, Lille 2012) et Le parti de la tolérance (La Méduse, Lille 2014).
Pierre Manent : Né en 1949 à Toulouse. Philosophe,
professeur de philosophie politique, directeur d’études à l’EHESS. Normalien et
agrégé de philosophie. Ancien assistant de Raymond Aron au Collège de France,
il fut en 1978 le co-fondateur de la revue Commentaire.
Il est aussi l’auteur de Naissances de la
politique moderne : Machiavel, Hobbes, Rousseau (Paris, Payot 1997), Tocqueville et la nature de la démocratie
(Paris, Gallimard 1982), La cité de
l’homme (Paris, Flammarion 1994), Cours
familier de philosophie politique (Paris, Fayard 2001), La raison des nations : Réflexions sur
la démocratie en Europe (Paris, Gallimard 2006), Enquête sur la démocratie : Études de philosophie politique (Paris,
Gallimard 2007), Les métamorphoses de la
cité (Paris, Flammarion 2010), Montaigne :
la vie sans loi (Paris, Flammarion 2014) et Situation de la France (Paris, Desclée de Brouwer 2015).
Louis Narot : Universitaire, membre du Cercle Henri Lagrange et collaborateur régulier
de l’AF 2000.
Dominique Schnapper : Née Dominique Aron en 1934, à
Paris, elle est sociologue et politologue. Directrice d’études à l’EHESS,
présidente du Musée d’art et d’histoire du judaïsme, ancien membre du Conseil
constitutionnel. Elle est en particulier l’auteur de La communauté des citoyens, sur l’idée
moderne de nation (Paris, Gallimard 1994), Qu’est-ce que la citoyenneté ? (Paris,
Gallimard 2000), La démocratie providentielle. Essai sur l’égalité contemporaine
(Paris, Gallimard, 2002), Qu’est-ce que l'intégration ? (Paris,
Gallimard 2007) et L’esprit
démocratique des lois (Paris, Gallimard 2014).
Pierre-André Taguieff : Né à Paris en 1946, philosophe, politologue et
historien des idées, directeur de recherche au CNRS. Il est l’auteur de très nombreux
ouvrages, dont La revanche du
nationalisme (Paris, PUF 2015). Il vient aussi de publier avec Annick
Duraffour, Céline, la race, le Juif.
Légende littéraire et vérité historique (Fayard, Paris 2017). L’entretien
que nous publions ici sous une forme étendue avait paru dans une première
version sur le site d’Atlantico.
Charles Taylor : Né en 1931 à Montréal. Professeur émérite de sciences
politiques et de philosophie à l’Université McGill. Philosophe de réputation
internationale, traduit dans plus de vingt langues, il est un des chefs de file
de la mouvance communautarienne. En 2007, il fut nommé par le gouvernement
québécois coprésident de la Commission de consultation sur les pratiques
d’accommodement reliées aux différences culturelles (dite « Commission
Bouchard-Taylor »), avec l’historien Gérard Bouchard. Il est l’auteur de Hegel et la société moderne (Paris,
Cerf 1998), Les sources du moi : La formation de l’identité moderne (Paris,
Seuil 1998), Le malaise de la modernité (Paris, Cerf 2002), Multiculturalisme : Différence et
démocratie (Paris, Aubier 1993), La
liberté des modernes (Paris, PUF 1999), Laïcité et liberté de conscience (avec
Jocelyn Maclure, Paris, La Découverte 2010) et L’âge séculier (Paris, Seuil 2011).
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