La Voie du Milieu, Sylvain Fuchs


A bout de souffle Thibault IsabelRecension : Dans son chapitre faisant l’éloge de la Voie du Milieu, Thibault Isabel propose une clé supplémentaire pour comprendre un tel basculement, basée sur un regard critique de la civilisation chrétienne, de ses présupposés et ses fondements. Une des critiques principales vis-à-vis du christianisme et des religions monothéistes révélées tient à la position transcendante et en dehors du monde reconnue au Dieu créateur. Dans leur rapport à un Dieu transcendant, les monothéismes développent une vision absolutiste qui a tendance à placer les croyants dans une situation de soumission de leur volonté à une puissance absolue, et par voie de conséquence au corps sacerdotal dépositaire de la foi ou s’en faisant le représentant, ainsi qu’à ses dogmes. Elles privilégieraient la tentation fanatique à l’exercice du libre arbitre. Si la société russe a aussi facilement basculé dans le Grand Soir révolutionnaire, ce pourrait être parce que l’on peut facilement substituer un horizon eschatologique à un autre aux yeux du croyant lambda, pour peu que cet horizon s’articule selon des schémas de pensées qui lui sont familiers. Rien ne ressemble plus à un absolutisme qu’un autre absolutisme. Cette explication, on peut d’ailleurs l’adresser aussi bien aux sociétés chrétiennes de l’époque qu’au judaïsme dans ce qu’ils ont en commun: une foi en un Dieu unique et transcendant.»

«Concernant désormais le seul aspect du contenu de la foi ou d’un système de valeurs, faut-il considérer que seule l’implication des individus compte dans la qualité d’un système, indépendamment de ses soubassements philosophiques ou métaphysiques fondamentaux? Nous entrons ici dans la sphère de l’intime conviction et de l’intuition, non catégoriquement affirmable ou infirmable. On peut néanmoins «juger l’arbre à ses fruits», ce qui suppose beaucoup de connaissance historique, de justesse philosophique, d’effort d’objectivité, sachant qu’aucun système n’est parfait. Nous connaissons les dérives ayant eu lieu au sein des sociétés européennes christianisées, mais nous reconnaissons aussi les splendeurs d’inspiration et de création dont elles ont fait preuve. Nous pourrions aussi transposer le constat aux sociétés islamiques, à la société juive, aux sociétés orientales bouddhiques, hindouistes ou taoïste; aux sociétés amérindiennes, aux sociétés animistes d’Afrique ou d’ailleurs, aux civilisations antiques disparues, aux grands projets humanistes nés sur le sol européen comme le fédéralisme proudhonien plébiscité par Thibault Isabel. Bien souvent, il existe une forme intelligente dans chaque tradition, sans aller jusqu’à affirmer que toutes les traditions se valent en termes d’aptitude à générer de façon durable une société de justice et d’épanouissement pour le plus grand nombre.
Sylvain Fuchs


A bout de souffle Thibault Isabel



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